Club Oenophile du Midi

Verticale Château Lafite Rothschild

Samedi 22 Avril 2006

 

 

Dégustation préparée par Michel Fauveau

Commentaires de Pierre Citerne

 

 

Ø      Quelques commentaires de contexte :

-          Les vins ne sont pas dégustés à l'aveugle.

-          DS : Didier Sanchez - PC : Pierre Citerne - PM: Patrick Moulène - PE : Philippe Escapat.

 

 

Ø      Ordre de dégustation :

1. Carruades de Lafite 2001

DS14 – PC14,5 - PM13 – PE14,5. Note moyenne : 14

-          Premier nez un peu encombré par des notes animales, réduites, puis le fruit ressort, direct et épicé.

-          La bouche est assez ample, charnue, vive ; un bon fruit qui se développe assez simplement.

 

2. Château Lafite Rothschild 2001

DS17/17,5 – PC17+ - PM16 – PE17,5. Note moyenne : 16,9

-          Le nez se montre d'emblée beaucoup plus net et raffiné que celui des Carruades. Une belle expression de cabernet, épicée, pénétrante, un peu cacaotée par l'élevage.

-          La matière, fine mais puissante, pleine sans être charnue, montre un très joli nerf, un caractère décidé et droit. Impression finale très convaincante : rémanence d'une très belle allonge et d'une grande élégance, malgré une saveur boisée encore dominante.

 

3. Château Lafite Rothschild 2000

DS17,5/18 – PC17+ - PM17,5/18 – PE18. Note moyenne : 17,6

-          Nez très mûr, assez opulent, profond ; expression aromatique pour l'instant limitée, dominée par un aspect mentholé, lorgnant vers l'eucalyptus…

-          Matière dense, moelleuse mais très structurée, d'une grande plénitude, avec une trame tannique puissante mais parfaitement enrobée, offrant un confort tactile velouté, chaleureux, presque "sudiste" (le vin ne titre pourtant que 12,6°). Certainement plus large et plein que le 2001, ce vin de grand potentiel semble aussi moins tendu et nerveux ; il est actuellement dans une phase assez ingrate.

 

4. Château Lafite Rothschild 1997

DS17,5 – PC16 - PM14 – PE16,5/17. Note moyenne : 15,8

-          Premier nez très poivronné, herbacé, qui s'ouvre heureusement sur un bouquet typé, complexe, déjà épanoui, plein d'attrait,  précis et subtil, quoique un peu étroit : tabac, animalité, mine de crayon…

-          Très souple dès l'attaque, le vin se montre savoureux, velouté, de belle densité, avec une structure tannique un peu lâche qui porte à croire que le vin est prêt, ou presque prêt. Une indéniable réussite dans le contexte du millésime.

 

5. Château Lafite Rothschild 1994

DS17,5 – PC17,5/18 - PM14 – PE17,5. Note moyenne : 16,7

-          Nez plus austère que les précédents, mais pénétrant, pur, extrêmement racé, avec des notes précises de graphite, de cèdre, de poulailler, et un côté "ferrugineux" (l'odeur de la rouille ?) qui annonce l'inflexibilité de la matière.

-          La matière : tendue comme une arbalète, certainement un peu dure encore, mais juteuse et pleine de vie ; tranchante, autoritaire, avec ce goût envoûtant de mine de crayon,  signature aromatique qui se prolonge au-delà de la finale, longue, tannique mais remarquablement fraîche. Un vin dont le classicisme noble et épuré pourrait raviver à lui seul la réputation de ce millésime décrié, même s'il est concevable que son angulosité, son intransigeance, puissent heurter certains palais. Il semble en tout cas paré pour une longue et lente évolution.

 

6. Château Lafite Rothschild 1990

DS17,5/18 – PC17 - PM18,5 – PE18/18,5. Note moyenne : 17,9

-          Le nez se livre immédiatement ; très mûr, déjà tertiaire, tout en largeur, il évoque davantage un (grand) Pomerol qu'un Pauillac : beaucoup de tabac, de sous-bois, de résine, de truffe…

-          On retrouve la même gamme aromatique en bouche (des notes de havane superbes), portée par une matière moelleuse, savoureuse, très douce (presque une impression de sucré). Heureusement la tension reprend le dessus en deuxième partie de bouche ; la finale est longue, saine, droite. Ce millésime semble précocement mature : ouvert, riche et chatoyant, mais sans la distinction ni l'autorité des plus grands Lafite.

 

7. Château Lafite Rothschild 1989

DS18 – PC18,5 - PM17 – PE19. Note moyenne : 18,1

-          La robe commence à présenter un peu de dépôt.

-          Nez très puissant, mais plus précis et surtout plus médocain que celui du 1990 ; un bouquet complexe et pénétrant, articulé, où l'on peut distinguer l'emblématique mine de crayon, parmi d'autres senteurs, florales (violette), animales (poulailler), éthérées… Un sommet de finesse et de complexité dans l'expression aromatique.

-          Cette impression de grande race, de sveltesse pleine et distinguée se poursuit en bouche. Une trame puissante mais fine, parfaitement mûre, sans aucune lourdeur structurelle ni alcoolique, avec une très belle tension de bout en bout.

 

8. Château Lafite Rothschild 1988

DS17 – PC(18+) - PM16,5/18 – PE18. Note moyenne : 17,5

-          Le nez est très mentholé, très After-eight, avec un fond fruité étonnamment jeune, puissant, profond, évoquant la myrtille et l'encre.

-          La matière s'impose dès l'attaque, complète, très dense, fraîche, encore impénétrable, bardée de tannins serrés et longs… Un vin très pur, monolithique ; plus dense, plus jeune et beaucoup moins volubile que ses deux successeurs (89 et 90 ─ d'ailleurs fort différents entre eux), son potentiel semble énorme.

 

9. Château Lafite Rothschild 1986

DS17/17,5 – PC(17+) - PM16,5/17- PE18. Note moyenne : 17,3

-          Un nez plus évolué, terrien, avec des notes de sous-bois, de tabac, de truffe, de résine, de sueur, un fruit plutôt compoté ; par rapport à d'autres millésimes goûtés ce soir, ce bouquet puissant présente un déficit de charme et de netteté aromatique.

-          En bouche, le vin est tannique, serré, concentré, presque rugueux au premier abord. Il redevient juteux en deuxième partie de bouche, très droit, frais, persistant.

 

10. Château Lafite Rothschild 1983

DS16 – PC17,5/18 - PM18,5 – PE17,5. Note moyenne : 17,4

-          La robe est encore dense, la bordure tuilée mince.

-          Très beau nez, classique, complet, profondément racé : la mine de crayon, le havane, la suie, le fumé…

-          Bouche déliée, fine sans faiblesse, avec un fruit suave, des tannins d'une grande élégance mais suffisamment présents pour donner un beau relief à ce corps qui pourrait paraître un peu léger. Ce vin apparaît très serein, dans une belle phase de maturité et d'expressivité.

 

11. Château Lafite Rothschild 1978

DS16,5 – PC16,5 - PM18,5 - PE17/17,5. Note moyenne : 17,2

-          Grenat plus nettement évolué que les robes précédentes.

-          Le premier nez évoque l'écurie, la sueur ; l'aération révèle un bouquet fondu, complexe, profond,  avec le fumé/graphite typique de Lafite, ainsi qu'une pointe herbacée/mentholée.

-          La matière est ronde, fondue, encore bien présente même si la chair semble un peu fatiguée, avec des tannins qui commencent à faire saillie. La finale laisse un peu trop transparaître la perception de l'alcool.

 

12. Château Lafite Rothschild 1975

DS19 – PC18,5 - PM19/19,5 – PE19/19,5. Note moyenne : 19

-          Double magnum

-          La robe est dépouillée, encore intense, avec un beau dégradé passant du grenat au fauve.

-          Nez viril, généreux, très mûr, puissant, jaillissant, solaire mais frais et articulé, avec un magnifique fumet animal, truffé aussi, qui n'écrase pas la vitalité du fruit.

-          Le fruit se montre également très présent en bouche, éclatant. La matière est richement dotée, vive et dense, droite sans rigidité, accrocheuse sans sécheresse. L'impression dominante est celle d'une grande vigueur, de raisins naturellement riches en sucres et en extrait, conférant une grande solidité, une grande jeunesse à ce 1975 ─ jeunesse encore certainement renforcée par la taille du contenant.

 

Conclusion

Malgré une personnalité particulière et constante, tant aromatique (la fameuse odeur de mine de crayon) que structurelle (puissante sveltesse), l'expression de ces quelques millésimes de Lafite apparaît remarquablement diverse. La comparaison de la trilogie 88, 89, 90 est de ce point de vue édifiante. On est loin d'un produit standardisé, ce qui est remarquable s'agissant d'une production d'une telle ampleur.

 

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